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Table des matières

 



INTRODUCTION



Le monde est tout ce qui est le cas.
Premier aphorisme du Tractatus Logico-Philosophique,
Ludwig Wittgenstein


La relativité générale et la théorie quantique des champs ne se rencontrent pas souvent en un même lieu à un même instant. Seuls l'Univers primordial et les trous noirs de faibles masses viennent à l'esprit. Je m'intéresse ici essentiellement au second point qui, nous le verrons, est en fait très lié au premier. Ces petits trous noirs sont des objets fascinants dont les propriétés éclairent (puisqu'en fait, ils ne sont précisément pas noirs du tout ! Sans doute faudrait-il mieux parler de cordes blanches...) un grand nombre de problèmes posés par la physique contemporaine. Nous montrerons comment il est aujourd'hui possible de contraindre leur densité locale en utilisant le rayonnement cosmique galactique et les gammas de haute énergie. Des voies possibles de détection futures seront esquissées à l'aide de l'émission d'antideutérons. Nous verrons également que ces objets sont riches d'informations sur l'Univers primordial : explicitement, ils sont le seul accès actuellement possible aux très petites échelles dans les premiers instants du Cosmos. Ils ouvrent également des voies importantes de recherche de nouvelle physique, en particulier dans la construction de théories généralisant la relativité d'Einstein. Ces modèles, où la densité lagrangienne n'est plus linéaire en courbure scalaire, permettent d'échafauder les prémices d'une théorie gravitationnelle quantique et sont le terrain de prédilection des trous noirs primordiaux. Enfin, nous conclurons sur certains travaux en cours et perspectives ouvertes concernant la formation de trous noirs auprès des accélérateurs dans le cadre des scénarios à dimensions supplémentaires, les contraintes sur l'échelle d'inflation ainsi que la masse des gravitinos et les effets de cohérence quantique lors de la mesure de la radiation de Hawking.

Je ne sais pas si les trous noirs primordiaux existent. Mais, à y regarder de plus près, je ne sais pas non plus si le monde existe. La physique, me semble-t-il, est une proposition sur le monde. Elle n'en est certainement pas qu'une version comme le pense Goodman, qu'un reflet comme le pense Kant ou qu'une illusion comme le pense Feyerabend. Mais elle n'a aucune légitimité à appréhender le monde mieux qu'une autre discipline cognitive digne de ce nom. Qui pense aujourd'hui réduire le monde de Kandinsky, celui de Schönberg, celui d'Apollinaire, celui de Dostoievsky, celui de Rodin à une équation d'onde ? Et pourtant, la physique a tant à dire sur son monde... Bref, les trous noirs primordiaux n'existent peut-être pas. Si cela était avéré ils sortiraient sans doute du champ d'investigation de la science de la nature. Aujourd'hui, en tous cas, ils sont une source très riche de réflexion et d'imagination pour les physiciens...

Les pages qui suivent présentent quelques aspects de physique des trous noirs primordiaux. L'ambition consiste à explorer toutes les pistes possibles pour tenter d'accéder à leur détection et à ouvrir quelques voies spéculatives pour appréhender des effets encore inconnus. Mais, comme toujours en fait, l'essentiel reste sans aucun doute à accomplir.


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Aurelien Barrau 2004-07-01