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Gravité de corde [61]

Ce paragraphe s'intéresse à la fin de vie des trous noirs primordiaux et présente un modèle, spéculatif mais cohérent, pour rendre compte du comportement lorsque la masse devient très petite.

L'évaporation de Hawking devient divergente lorsque la masse du trou noir tend vers zéro. En effet, le spectre de masse s'écrivant $\frac{dM}{dt}
\propto -\frac{1}{M^2}$ (comme montré dans le premier paragraphe de ce chapitre), on voit bien que $\lim_{M \to 0}
\frac{dM}{dt}$ n'est pas définie. De plus, dans cette image, l'évaporation complète conduirait sans doute à une singularité nue qui contredirait le principe de censure cosmique de Penrose. Le formalisme habituel ne peut plus s'appliquer lorsque la masse devient de l'ordre de la masse de Planck. La description quasi-classique est inadaptée et les phénomènes de gravité quantique doivent être pris en compte.

Étant donné que la Relativité Générale n'est pas une théorie renormalisable, sa quantification directe est impossible. Pour construire une théorie semi-classique de la gravitation, à titre de modèle provisoire, le lagrangien standard doit être généralisé. Une des approches possibles consiste à étudier un développement de l'action en courbure scalaire, c'est-à-dire à autoriser des corrections de courbure d'ordres élevés. Cette démarche considère que dans le régime asymptotique, telle que se présente la gravitation en cosmologie ou en astrophysique, seul le terme d'ordre le plus bas contribue et la théorie d'Einstein est bien vérifiée. Mais lorsque l'on considère des phénomènes qui prennent naissance au voisinage immédiat d'un petit trou noir, i.e. dans une zone où la courbure de l'espace-temps est très élevée, les termes d'ordres supérieurs doivent intervenir. Nous nous focalisons ici, d'un point de vue phénoménologique, sur le terme de second ordre (il a été montré que les ordres supérieurs ne changent, qualitativement, pas le résultat, cf. plus loin) appelé ``invariant de Gauss-Bonnet" :

\begin{displaymath}
S_{GB}=R_{ijkl}R^{ijkl} - 4R_{ij}R^{ij} + R^2.
\end{displaymath}

Il existe plusieurs façons de justifier la forme de ce terme [62]. On peut le voir comme une simple extension au second ordre à partir des tenseurs de Riemann et de Ricci et du scalaire de Ricci dont les coefficients sont dictés par la loi de Landau [63]. On peut aussi, plus spécifiquement, noter que ce terme apparaît comme la correction quantique dominante dans l'action des théories de cordes hétérotiques [64]. Il représente de plus, à cinq dimensions, la seule combinaison invariante de termes conduisant à des équations de champ du second ordre en tenseur métrique [65] [66]. Il a même été montré, dans le cadre des approches multi-dimensionnelles, que le mode-zéro du graviton est localisé sur le brane quand ce terme est inclus dans l'action du bulk [67]. Enfin, le terme de Gauss-Bonnet est aujourd'hui très étudié en cosmologie [68], en particulier dans les modèles Randall-Sundrun de type II (équivalents à une gravité à quatre dimensions couplée à une théorie de champ conforme par la correspondance AdS/CFT [69]) où un brane isotrope et homogène se propage au sein d'un espace Schwarzschild-Anti-de Sitter à cinq dimensions [93]. En résumé, il est l'une des extensions de la relativité d'Einstein les plus prometteuses et se retrouve à partir de plusieurs approches indépendantes dont certaines sont modèle indépendantes.

Partant donc de ce modèle (où le terme de Gauss-Bonnet est dynamiquement couplé à un champ scalaire - considéré ici comme le champ de dilaton puisque le couplage est imposé par les théories de cordes), nous nous intéressons à l'étude de la fin de vie des trous noirs primordiaux. Nous montrons d'abord que la loi d'évaporation de Hawking doit être fortement modifiée au voisinage de la masse de Planck. La nouvelle forme du spectre émis est calculée à partir de l'approximation WKB, en prenant la partie imaginaire de l'action (de façon analogue à l'effet tunnel). Pour ce faire, nous nous plaçons dans les coordonnées de Painlevé qui, à la différence de celles de Schwarzschild, évitent la singularité de coordonnées en $R=R_S$, et nous paramétrons les fonctions ``correctives" par rapport au comportement asymptotique de Schwarzschild. Le taux de perte de masse présente, dans cette approche, une forme très caractéristique avec un maximum nettement marqué puis une lente décélération correspondant à la vie post-mortem du trou noir durant laquelle sa température augmente mais l'énergie des quanta émis diminue [71]. Intuitivement, on peut comprendre ce comportement en imaginant que la température correspond en fait à l'énergie des particules qui se couplent le plus naturellement avec le trou noir (i.e. dont la longueur d'onde Compton est de l'ordre du rayon gravitationnel). Elle ne peut donc qu'augmenter au cours de l'évaporation. En revanche, l'énergie moyenne des quanta émis commence à diminuer à partir du moment où la limite topologique qui impose une masse minimale en dessous de laquelle le trou noir ne peut pas transiter [72] tronque la distribution naturelle de probabilité. Tout se passe comme si le trou noir ``essayait" d'émettre un quantum toute les $10^{-43}$ s (soit 10 $t_{Pl}$ si l'on considère, par exemple, que sa masse est de l'ordre de 10 $M_{Pl}$) mais que l'immense majorité du spectre naturel lui était quantiquement interdit : seul dans le cas où l'évènement ``tombe" dans la petite portion pour laquelle l'évaporation peut avoir lieu (i.e. conduisant à une masse supérieure à la masse minimale), le quantum est émis et la masse diminue, rendant la prochaine itération moins probable encore et l'énergie moyenne plus faible.
Le flux intégré de ces reliques est calculé au niveau de la Terre en supposant une distribution spatiale standard, en tenant compte du décalage spectral et, surtout, de l'évolution des sources qui, lorsqu'elles sont éloignées, sont vues dans un état plus précoce de leur vie. Cette compétition entre des effet antagonistes (le décalage spectral diminue l'énergie alors que la précocité favorise l'émission à haute énergie) conduit à un spectre intégré de forme très particulière dont l'éventuelle détectabilité est étudiée.

L'approche présentée dans ce paragraphe vise donc à montrer que les trous noirs primordiaux pourraient être les seuls objets de l'Univers contemporain nécessitant un traitement quantique de la gravitation. Ils représenteraient un laboratoire de physique inespéré. Beaucoup d'aspects de leur évaporation, en particulier dans la région de Planck, demeurent extrêmement spéculatifs mais un modèle cohérent commence à émerger. En particulier, il est important de noter qu'une approche très différente dans son principe, fondée sur l'évolution de la constante de couplage gravitationnelle sous l'effet du groupe de renormalisation [73], conduit à des résultats remarquablement similaires à ceux présentés ici.

L'action gravitationnelle est donc ici supposée décrite par :

\begin{displaymath}
S = \int d^4 x \sqrt{-g} \Biggl[ - R + 2 \partial_\mu \phi
\partial^\mu \phi
+ \lambda \xi(\phi) S_{GB} + \ldots \Biggr],
\end{displaymath}

$\lambda $ est la constante de couplage de la théorie de cordes sous-jacente. Si l'on considère que $\phi$ est le champ dilatonique, la fonction de couplage $\xi(\phi)$ est fixée par les principes fondamentaux des modèle de cordes et doit s'écrire [74,75] $\exp(-2\phi)$, ce qui conduit à :

\begin{displaymath}
S = \int d^4 x \sqrt{-g} \Biggl[ - R + 2 \partial_\mu \phi
...
...i \nonumber \\
+ \lambda e^{-2\phi} S_{GB} + \ldots \Biggr].
\end{displaymath}

Partant de ce Lagrangien, une solution de type trou noir statique, à symétrie sphérique et asymptotiquement plate est recherchée. Pour ce faire, la métrique est paramétrisée par [63] :
$\displaystyle ds^2 = \Delta dt^2 - \frac{\sigma^2 }{\Delta } dr^2 - r^2
(d \theta^2 + \sin^2 \theta d \varphi^2),$     (2.1)

avec $\Delta=\Delta(r)$, $\sigma=\sigma(r)$. Le développement asymptotique des solutions autour de la forme de Schwarzshild s'écrit :

\begin{eqnarray*}
\Delta (r \rightarrow \infty) & = & 1 - \frac{2M}{r}
+ O\biggl...
...ghtarrow \infty) & = & \frac{D}{r}
+ O\biggl(\frac{1}{r}\biggr),
\end{eqnarray*}



$D$ est la charge dilatonique (cf. [63]). Une solution conduisant à un horizon régulier de type quasi-Schwarzshild est obtenue par simulation numérique et le comportement au voisinage de l'horizon se paramétrise :
$\displaystyle \Delta$ $\textstyle =$ $\displaystyle d_1 (r-r_h) + d_2 (r-r_h)^2 + \ldots,$  
$\displaystyle \sigma$ $\textstyle =$ $\displaystyle s_0 +s_1 (r-r_h) + \ldots,$  
$\displaystyle \phi$ $\textstyle =$ $\displaystyle \phi_{00} + \phi_1 (r-r_h) + \phi_2 (r-r_h)^2 + \ldots,$ (2.2)

$(r-r_h) \ll 1$, $s_0$, $\phi_0 = e^{-2\phi_{00}}$ et $r_h$ sont trois paramètres indépendants. Après résolution des équations au premier ordre de perturbation, on obtient la limite suivante sur le rayon minimal possible d'un trou noir [63] :
$\displaystyle r_h^{inf} = \sqrt{\lambda} \ \sqrt{4 \sqrt{6}} \phi_h (\phi_\infty),$     (2.3)

$\lambda $ est une combinaison des constantes de couplages (c'est donc un paramètre fondamental) et $\phi_h (\phi_\infty)$ est la valeur du champ de dilaton à $r_h$. Ce phénomène est illustré sur la figure 2.3 à gauche pour la fonction métrique $\Delta$ : quand l'horizon devient trop petit la structure des solutions change et ne conduit plus à une solution de type trou noir. Des valeurs raisonnables de ces grandeurs (enfin, disons "heuristiquement" raisonnables car aucune théorie ne peut réellement conduire à des prédictions fiables dans ce secteur) conduisent à une masse minimale voisine de quelques masses de Planck. Il est important de noter que ce résultat est stable sous l'effet de perturbations temporelles et, surtout, sous l'effet de l'ajout de termes d'ordres supérieurs en courbure qui peuvent être calculés analytiquement jusqu'à l'ordre 4 :


\begin{displaymath}
L_3 =
3 R^{\mu\nu}_{\alpha\beta} R^{\alpha\beta}_{\lambda\r...
...pha} R^\alpha_\mu - 12 R R^2_{\alpha\beta}
+ \frac{1}{2} R^3 ,
\end{displaymath}

et

\begin{displaymath}
L_4 = \zeta (3) \Biggl[ R_{\mu\nu\rho\sigma} R^{\alpha\nu\rh...
...sigma}
R^{\mu}_{\sigma\gamma\delta} R_{\rho}^{\nu\gamma\delta}
\end{displaymath}


\begin{displaymath}
- R_{\mu\nu}^{\alpha\beta} R_{\alpha\beta}^{\rho\nu}
R_{\rho...
...beta\sigma\gamma\delta} R_{\delta\gamma\rho}^{\alpha} \Biggr]
\end{displaymath}

ne changent pas le comportement. Ils correspondent, respectivement, aux contractions, d'ordre 3 et d'ordre 4 en courbure scalaire, réalisables à partir du tenseur de Riemann et ne conduisant pas à des particules "fantômes". Etant donné que les modifications topologiques associées à ces termes sont situées à l'intérieur [76] de l'horizon, elles ne modifient pas la structure des soltutions et n'entrent pas en conflit avec le résultat précédent. Les simulations numériques montrent que les termes d'ordres supérieurs augmentent (et donc stabilisent) la valeur de la masse minimale.

Figure: Gauche : Illustration d'une transition topologiquement interdite. Droite : Forme du taux de perte de masse pour un trou noir de Gauss-Bonnet.
\scalebox{0.35}{\includegraphics{ps/last.ps}} \scalebox{0.35}{\includegraphics{ps/dmdt.ps}}

Dans l'approximation WKB, le processus d'évaporation de Hawking est décrit localement autour de l'horizon. On peut alors utiliser un développement au premier ordre des fonctions métriques suivant la définition précédemment donnée :

\begin{displaymath}\Delta (M,r) = 1 - \frac{2 M }{r} \epsilon (M)
= \frac{1}{2 M \epsilon} (r - 2 M \epsilon (M)),
\sigma (M,r) = \sigma_0 (M).
\end{displaymath}

Pour procéder à une évaluation numérique, nous avons procédé à un ajustement des fonctions simulées par un développement de Taylor en $M$ et $1/M$, valide entre $M=M_{min}=~quelques~M_{Pl}$ et $M\approx 1000 M_{Pl}$ :

\begin{displaymath}
\epsilon = 1 - \frac{\epsilon_1}{M} - \frac{\epsilon_2}{M^2}
+ \frac{\epsilon_3}{M^3} - \frac{\epsilon_4}{M^4},
\end{displaymath}


\begin{displaymath}
\sigma_0 = \sigma_2 (M-M_{min})^2
- \sigma_3 (M-M_{min})^3
+ \sigma_4 (M-M_{min})^4
- \sigma_5 (M-M_{min})^5,\end{displaymath}

où (pour $M_{min}=10M_Pl$), les coefficients obtenus sont : $\epsilon_1 = 10.004$, $\epsilon_2 = 13.924$, $\epsilon_3 = 2856.3$, $\epsilon_4 = 25375.0$, $\sigma_2 = 0.11933 * 10^{-04}$, $\sigma_3 =
0.30873 * 10^{-07}$, $\sigma_4 = 0.30871 * 10^{-10}$, $\sigma_5 =
0.11051 * 10^{-13}$. Ces résultats peuvent maintenant être utilisés pour évaluer le flux de Hawking modifié dans la région des faibles masses. Suivant l'approche de [77], on peut calculer la partie imaginaire de l'action (c'est le traitement WKB de l'effet tunnel) entre les rayons $r_{in}$ et $r_{out}$ :

\begin{displaymath}Im (S) = Im \int_{M}^{M - \omega} \int_{r_{in}}^{r_{out}}
\frac{dr}{\dot r} dH,\end{displaymath}

$\omega$ est l'énergie de la particule considérée, $H$ est l'Hamiltonien total et la métrique est écrite de façon à éviter toute singularité à l'horizon. Nous utilisons les coordonnées de Painlevé (précisément non divergentes en $r_h$, la divergence qui apparaît dans les coordonnés de Schwarshlid n'est qu'une singularité apparente due au système choisi). On peut encore écrire :

\begin{displaymath}Im(S) = Im \int\limits_{r_{in}}^{r_{out}} p_r \,dr = Im
\int\limits_{r_{in}}^{r_{out}} \int\limits_0^{p_r} p_r' \,dr,
\end{displaymath}

$p_r$ est l'impulsion généralisée. Pour un trou noir de Gauss-Bonnet, les géodésiques sont données par :

\begin{displaymath}\dot{r} = \frac{dr}{d\tau} = \frac{\Delta}{ \sqrt{\sigma^2 - \Delta}
\mp \sigma} = \mp \sigma - \sqrt{\sigma^2 - \Delta},
\end{displaymath}

ce qui conduit à :

\begin{displaymath}Im (S) = Im \int\limits_M^{M - \omega}
\int\limits_{r_{in}}^{...
...silon} \frac{dr d\omega'}{ \sigma - \sqrt{\sigma^2 -
\Delta}}.
\end{displaymath}

Après les changements de variables appropriés et un peu d'algèbre, la partie imaginaire de l'action s'écrit :

\begin{displaymath}Im(S) = - Im \int\limits_{0}^{\omega} d\omega' \left(
\int\li...
...qrt{\sigma^2 - \frac{r}{2 (M -
\omega')\epsilon} + 1}} \Biggr)
\end{displaymath}


\begin{displaymath}=- \int\limits_{0}^{\omega} d\omega' \left( 4 (M - \omega')
\epsilon \sigma \pi \right).\end{displaymath}

Ce qui se simplifie numériquement en :

\begin{displaymath}2 Im(S) = \frac{840 \pi}{M^2(M-\omega)^2} \alpha,\end{displaymath}

$\alpha$ est une expression dont la longueur dépasse quelques pages mais qui se calcule (heureusement !) très bien par une machine. Pour des valeurs raisonnables de $M_{min}$ et en utilisant les développements de Taylor précédement mentionnés, on peut approximer $Im(S)$ par :

\begin{displaymath}Im(S) = k * (M-M_{min})^3,\end{displaymath}

$k\approx 5\times 10^{-4}$ en unités de Planck (cf [61] pour une illustration de la qualité de l'estimation).

Le spectre différentiel peut alors s'écrire :

\begin{displaymath}\frac{d^2N}{dEdt}=\frac{\Gamma_s}{2\pi\hbar}\cdot
\frac{\Theta((M-M_{min})c^2-E)}{e^{Im(S)}-(-1)^{2s}}.
\end{displaymath}

où nous avons ajouté à l'approche de [77] une fonction $\Theta$ de Heavyside qui assure la conservation de l'énergie dans le domaine des très faibles masses. Dans la suite de ce chapitre, j'utilise les unités conventionnelles (SI) et non plus les unités de Planck dans la mesure ou l'objectif n'est plus maintenant de fixer le cadre théorique mais d'estimer des valeurs expérimentales. Deux questions doivent ici être résolues : quels types de champs seront émis (et, corrélativement, quelles fonctions de couplage $\Gamma$ doivent être utilisées) et quelle gamme de masses est physiquement intéressante ? Pour y répondre, le taux de perte de masse doit être calculé :

\begin{displaymath}-\frac{dM}{dt}=\int_0^{(M-M_{min})c^2}\frac{d^2N}{dEdt}\cdot
\frac{E}{c^2} dE\end{displaymath}

où l'intégration est menée jusqu'à $(M-M_{min})c^2$ pour s'assurer que la transition sous $M_{min}$ demeure impossible. Les probabilités d'absorption peuvent clairement être prises dans la limite $GME/\hbar
c^3 \ll 1$ étant donné le cut-off imposé par $M_{min}$ qui empèche d'atteindre les énergies thermiques de l'ordre de $kT$. En utilisant les formules analytiques des $\Gamma_s$ dans l'approximation des faibles énergies [78] et le développement asymptotique de $Im(S)$ dérivé au paragraphe précédent, on obtient :

\begin{displaymath}-\frac{dM}{dt}\approx\frac{16}{9\pi}\frac{G^4M_{Pl}}{\hbar^5c^2k}M^4
(M-M_{min})^3\end{displaymath}

pour l'émission de particules de spin 1, dont il est aisé de montrer qu'elle domine celle des particules de spins 1/2 et 2. Il est intéressant de noter que l'émission des fermions autour de $M_{min}$ n'est pas considérablement modifiée par le modèle EDGB (Einstein-Dilaton-Gauss-Bonnet), étant donné qu'à l'ordre le plus bas, $\exp(Im(S))-(-1)^{2s} \approx 2$. De plus, si l'on se restreint aux champs sans masse (i.e. à l'émission très proche de $M_{min}$), le terme EDGB change la nature des particules les plus abondamment émises des neutrinos aux photons. Le taux de perte de masse réel est donc simplement le double de celui donné ici pour tenir compte des deux états d'hélicité du photon.

Avec l'expression obtenue $-dM/dt=f(M)$, il est possible de calculer la masse $M$ pout tout temps $t$ après la formation à la masse initiale $M_{init}$ :

\begin{displaymath}t=\int_{M}^{M_{init}}\frac{dM}{f(M)}\approx\frac{9\pi k\hbar^5
c^2}{32G^4M_{Pl}^3}.\end{displaymath}

Comme attendu, le résultat ne dépend pas de $M_{init}$ puisque le temps requis pour passer de $M_{init}$ a quelques $M_{min}$ est très petit devant celui nécessaire pour passer de $M_{min}$ à $M$ dès que $M_{init}<<10^{15}$ g et $t\approx10^{17}$ s. Au temps $t$, la masse est donc donnée par :

\begin{displaymath}M\approx M_{min}+\sqrt{\frac{9k\pi\hbar^5 c^2}
{8M_{min}^4G^4M_{Pl}^3t}}.
\end{displaymath}

Ce qui peut être implémenté dans l'expression du spectre d'émission :

\begin{displaymath}\frac{d^2N}{dEdt}\approx\frac{32}{3\pi}\left(\frac{8}{9\pi}\r...
...sqrt{\frac{9k\pi\hbar^5 c^6}{8M_{min}^4G^4M_{Pl}^3t}}-E\right)
\end{displaymath}

conduisant à une fréquence d'émission de

\begin{displaymath}f=\int_0^{(M-M_{min})c^2}\frac{d^2N}{dEdt}dE\approx\frac{36}{15}
\cdot\frac{1}{t}.\end{displaymath}

Quand on applique cette démarche à des reliques de trous noirs formées dans l'Univers primordial, cela conduit à $f\approx 6\times 10^{-18}$ Hz avec des énergiee typiques de l'ordre de $1.8\times 10^{-6}$ eV. Ce taux d'émission est très petit (en fait, il est intéressant de noter que la capacité calorifique du trou noir change de signe !) puisqu'il correspond à une évaporation en photons dont la longueur d'onde est beaucoup plus grande que le rayon gravitationnel du PBH. Il faut néanmoins souligner que le spectre présente un comportement monotoniquement croissant (jusqu'au cutoff) avec une dépendance en $E^4$, ce qui est tout-à-fait singulier en astrophysique (et témoigne du couplage naturel du trou noir). De plus, cela montre que, bien que de faible intensité, l'évaporation ne s'arrête jamais et décroit en $1/\sqrt{t}$. La différence entre ce modèle et la vision habituelle (théorie de Hawking simple) est présentée à la figure 2.3 à droite.

Pour évaluer l'éventuelle détectabilité expérimentale de ce phénomène, nous définissons : $R$ la distance entre la source et l'observateur, $z$ le redshift correspondant, $\theta$ l'angle d'ouverture du détecteur, $d^2N/dEdt(E,t)$ le flux individuel d'une relique de trou noir (tel qu'évalué dans cette étude) au temps $t$, $\rho(r)$ la densité numérique de reliques prenant en compte la dilution due à l'expansion de l'Univers, $R_{max}$ l'horizon cosmologique dans la gamme d'énergie considérée, $t_{univ}$ l'âge de l'Univers et $H$ le paramètre de Hubble. Le spectre "expérimental" $F$ (J$^{-1}\cdot $s$^{-1}\cdot $sr$^{-1}$.m$^{-2}$) s'écrit :

\begin{displaymath}F=\int_0^{Rmax}\frac{d^2N}{dEdt}\left(E(1+z),t_{univ}-\frac{R...
...frac{\rho(R) \cdot \pi R^2 tan^2(\theta) }{4\pi R^2} {\rm d}R,
\end{displaymath}

ce qui conduit à :

\begin{displaymath}F= tan^2(\theta) \frac{8}{3\pi}\left(\frac{8}{9\pi}
\right)^{...
...{1-\frac{HR}{c}}\right)^2
(t_{univ}-\frac{R}{c})^{\frac{3}{2}}
\end{displaymath}


\begin{displaymath}
\times \Theta\left(\sqrt{\frac{9k\pi\hbar^5c^6}{8M_{min}^4G^...
...-E\sqrt{\frac{1+\frac{HR}{c}}{1-\frac{HR}{c}}}\right){\rm d}R.
\end{displaymath}

Cette intégrale, qui tient compte à la fois de ce que les reliques formées loin de la Terre sont à des stades plus précoces de leur évolution (effet vers les hautes énergies) et de ce que le décalage spectral est plus important (effet vers les basses énergies) peut être analytiquement calculée. Elle conduit alors, pour $\Omega_{reliques}=\Omega_{CDM}\approx0.3$, à $F\approx1.1\cdot 10^{7}~{\rm J}^{-1}~{\rm s}^{-1}~{\rm m}^{-2}~{\rm sr}^{-1}$ autour $10^{-6}$ eV, ce qui est extrêmement petit, environ 20 ordres de grandeur en-dessous du fond astrophysique. Ceci ferme la porte à toute possibilité de mise en évidence directe de l'émission de ces reliques. Réciproquement, cela ouvre une voie naturelle à les considérer comme un excellent candidat à la matière noire froide ! L'enjeu de cette étude était néanmoins avant tout purement théorique et concernait le problème de la fin de vie qui trouve ici une réponse possible.


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Aurelien Barrau 2004-07-01