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Logique et architecture du déclenchement rapide

La totalité du système de déclenchement du télescope se situe à l'intérieur de la caméra elle-même, juste derrière le plan focal du miroir [45]. A la différence de toutes les autres expériences d'astronomie gamma, les signaux provenant des photomultiplicateurs parcourent moins d'un mètre avant d'être utilisés pour déclencher l'appareil. Ils ne subissent ainsi pratiquement aucune dégradation "capacitive" suite à l'utilisation de câbles.

Fondamentalement, la logique de déclenchement repose sur une coïncidence majoritaire entre les pixels de la caméra.

Il a néanmoins été imaginé une sectorisation de façon à réduire la probabilité de déclenchement fortuit, à baisser l'acceptance aux hadrons (dont les images sont plus "dispersées") et à limiter l'acquisition d'événements inexploitables. La probabilité de coïncidence aléatoire pour $k$ pixels touchés parmi $N$ pendant un temps $\tau$ est donnée par:

\begin{displaymath}P=kC_N^k\left(1-e^{-f_B\tau}\right)\left(e^{-f_B\tau}\right)^{N-k}\end{displaymath}

$f_B$ est la fréquence de comptage au-dessus d'un seuil donné. En l'occurrence $\tau$ est de l'ordre de 2 ns (temps de coïncidence obtenu à l'aide des comparateurs). Le nombre de pixels touchés a été fixé à $k=4$, en accord avec les simulations, pour déclencher dès les faibles énergies mais disposer d'une quantité d'informations suffisante pour reconstruire l'évènement. La fréquence de fond de ciel est de l'ordre de quelque $10^8$ photons cm$^{-2}$s$^{-1}$sr$^{-1}$ [46] [47], ce qui se traduit par un taux de 0.1-0.2 photoélectrons / porte d'intégration ($\approx$ 13 ns) par photomultiplicateur. Le seuil individuel des photomultiplicateurs est choisi à 3 photoélectrons ce qui, suivant la figure 4.10, correspond à quelques dizaines de kHz. La probabilité peut alors s'approximer à:

\begin{displaymath}P\approx kC_N^k\left(f_B\tau\right)^k,\end{displaymath}

puisque $f_B\tau\ll1$. La fréquence correspondante est alors:

\begin{displaymath}F\approx\frac{k}{\tau}C_N^k\left(f_B\tau\right)^k.\end{displaymath}

Avec une logique de coïncidence majoritaire impliquant les 546 photomultiplicateurs internes, la fréquence de déclenchement fortuit pourrait atteindre (en cas de présence d'une étoile faible dans quelques pixels, par exemple) environ 100 Hz. Cette valeur, difficilement compatible avec la fréquence maximum d'acquisition, poserait de grandes difficultés de traitement de données en imposant un facteur de réjection considérable. La zone de déclenchement a ainsi été réduite aux 288 photomultiplicateurs intérieurs, ce qui n'entraine pratiquement aucune perte de signal dans la mesure où les événements trop coupés par le bord du champ ne sont pas analysables. De plus, la forme des images étant connexe et généralement elliptique (cf analyse et simulations) de dimensions réduites (largeur $<$ 2 pixels et longueur $<$ 5 pixels à mi-hauteur de la distribution de lumière), cette zone a été divisée en 9 secteurs angulaires de 48 photomultiplicateurs. Le coefficient combinatoire est alors réduit d'un facteur 19000, rendant tout à fait négligeable la fréquence des déclenchements fortuits. Pour éviter toute perte d'efficacité aux frontières, 16 photomultiplicateurs de chaque secteur sont en recouvrement avec le secteur adjacent. Ils définissent un secteur élémentaire (cf 4.20).

Il s'ensuit que tout groupe de photomultiplicateurs contenu dans un secteur angulaire de 48 photomultiplicateurs intérieurs adjacents peut déclencher l'acquisition s'il satisfait la condition de coïncidence. La figure 4.20 montre la logique de cette coïncidence. La structure "radiale" de cette géométrie est également reproduite au niveau électronique dans la disposition et le nombre de cartes utilisées pour éviter de rompre la symétrie du détecteur.

Figure 4.20: Zones de déclenchement, avec secteurs et sous-secteurs (ou secteurs élémentaires).
\begin{figure}\par\epsfxsize =6.5cm
\begin{displaymath}
\epsfbox{ps/sec.eps}\end{displaymath}\par\end{figure}

Afin de minimiser le temps de coïncidence, des comparateurs sont utilisés à la place de discriminateurs classiques. Ils présentent la caractéristique de permettre au signal logique généré lorsque le signal analogique dépasse le seuil choisi de ne pas avoir une largeur fixe mais dépendante de la largeur de ce dernier. Il s'ensuit que le synchronisme de la lumière Tcherenkov des gerbes gamma est ainsi pleinement exploité. Techniquement, une première somme sur 16 sorties de comparateurs est d'abord effectuée. De façon que le seuil puisse éventuellement être descendu jusqu'à 2 photoélectrons, le signal analogique des photomultiplicateurs est amplifié par un composant large-bande NEC1678 de gain 15. Ce dernier ne dégrade pratiquement pas le signal comme le montre la figure 4.21.

Figure 4.21: Impulsion mesurée d'un photomultiplicateur R3878 après l'amplificateur NEC 1678.
\begin{figure}\begin{displaymath}
\epsfxsize =8.cm
\epsfbox{ps/f_7acq.eps}\end{displaymath}\par\end{figure}

Un second étage produit la somme analogique des 3 sous-secteurs correspondant à la somme partielle sus-mentionnée. De cette façon, 9 sommes sur 3 sous-secteurs sont obtenues. La coïncidence majoritaire (au moins $k$ pixels parmi 48 au-dessus du seuil) est alors réalisée indépendamment pour les 9 sommes par un discriminateur. Le déclenchement est mis en oeuvre par une fonction logique OU entre tous les secteurs. La partie supérieure de la figure 4.22 présente le sytème de déclenchement.

Figure 4.22: Principe de traitement d'une des 288 voies électroniques participant au déclenchement.
\begin{figure}\begin{displaymath}
\epsfxsize =13.cm
\epsfbox{ps/voieelec.eps}\end{displaymath}\par\end{figure}

Chaque sortie de comparateur est également envoyée à un multiplexeur 8 canaux connecté à des échelles de comptage. Les modèles choisis sont des CAEN V 560, 100 MHz. Ces dernières permettent d'avoir une première évaluation de l'évolution du bruit de fond de ciel dans les pixels mais également de détecter la présence de l'image d'une étoile dans un photomultiplicateur. Ce dernier point est important dans la mesure où il est possible à un astre de magnitude moyenne de produire suffisamment de lumière pour endommager les photomultiplicateurs. L'image d'une telle source étant quasi-ponctuelle, la surface du photomultiplicateur n'intervient pas et toute la lumière collectée par le miroir est concentrée sur la photocathode en question. Le nombre de photoélectrons induit peut s'écrire:

\begin{displaymath}\sum_{plages}{\frac{\Phi \times \Delta \lambda \times QE(\lam...
... R(\lambda) \times \lambda_{moy}}{\lambda \times E_{\lambda}}},\end{displaymath}

$\Phi$ est le diamètre du miroir, $\Delta \lambda$ est la largeur de la plage de longueur d'onde considérée, $QE(\lambda)$ est l'efficacité quantique de la photocathode, $T(\lambda)$ est la transmission de l'atmosphère [48], $R(\lambda)$ est la réflectivité du miroir, $\lambda_{moy}$ est la longueur d'onde moyenne de la plage, $E_{\lambda}$ est l'énergie d'un photon de longueur d'onde $\lambda$. La densité spectrale d'énergie d'une étoile dépendant de son type, il n'est pas possible de donner une relation bijective exacte entre la magnitude et le taux de comptage engendré. Il apparaît néanmoins que la magnitude limite moyenne correspondant au courant maximum admissible (0.03 mA) est voisine de $m=5$. Les échelles comptant le signal discriminé au seuil individuel de déclenchement (par construction), la correspondance entre le taux de photoélectrons produits et le comptage obtenu à un seuil donné a été étudiée au laboratoire. La limite de comptage obtenue, dans le cas d'un seuil à 3 photoélectrons, est de $4\times10^6$ Hz. Cette valeur ne peut être directement obtenue par des considérations statistiques sur la loi de Poisson suite à la présence d'after pulses précédemment mentionnés.

Lorsqu'un pixel est identifié comme étant soumis à la lumière d'une étoile, sa haute tension est automatiquement baissée et il est ignoré dans la logique de déclenchement.

La "densité" de composants électroniques et de câbles dans la caméra de l'imageur étant considérable, la température doit être régulée. En l'absence de système de refroidissement particulier, elle augmente à peu près quadratiquement avec le temps et atteint plus de $50^0$C en moins de quelques minutes. Un grand nombre d'essais ont été effectués et il a été choisi de refroidir l'ensemble du dispositif à l'aide d'une turbine d'extraction et de 16 petits ventilateurs d'alimentation d'air. Des capteurs en différents points de la caméra contrôlent la température locale et déclenchent une alarme si un point dépasse 45$^\circ$ ou si l'écart entre deux capteurs dépasse 15$^\circ$. Ne disposant pas de système de climatisation, cette technique est d'autant plus efficace que la température extérieure est basse. Elle n'a jamais empêché le fonctionnement normal durant les nuits d'observation.


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Aurelien Barrau 2004-07-01