Première cartographie SZ d’un amas de galaxies avec NIKA2
L’avènement de la camera NIKA2 au télescope de 30 mètres de l’IRAM (Grenade, Espagne) constitue une opportunité unique pour l’observation d’amas de galaxies par effet Sunyaev Zel’dovich (SZ), grâce à ses deux bandes de fréquence (150 et 260 GHz), sa grande sensibilité, son excellente résolution angulaire et son grand champ de vue.
En avril 2017, la collaboration NIKA2 a observé un premier amas faisant partie de l’échantillon du grand programme d’observation SZ. Il s’agit de l’amas PSZ2 G144.83+25.11 à un redshift z=0,58 observé pendant 11 heures avec des conditions atmosphériques relativement mauvaises. Les excellentes performances de la caméra NIKA2 (R. Adam et al., A&A 2018) ont néanmoins permis d’obtenir des résultats de premier plan.
La carte NIKA2 obtenue à 150 GHz (cf. figure) met en évidence un amas cartographié à haute résolution (plus de 20 fois mieux que Planck) et avec un fort signal sur bruit jusque dans les régions périphériques. Le résultat est comparable à la carte du milieu intras-amas obtenue en rayons X par le satellite XMM-Newton, ce qui ce qui facilite les analyses jointes SZ/X. En particulier, l’observation faite avec NIKA2 permet d’identifier une région de surpression dans l’amas et une source ponctuelle submillimétrique, qui peuvent donc être prises en compte dans l’analyse.
Les données NIKA2 ont été utilisées conjointement avec les données SZ obtenues par d’autres expériences opérant dans le millimétriques (MUSTANG, Bolocam et Planck), afin d'établir de manière non paramétrique le profil de pression, depuis le centre de l’amas jusqu'à sa périphérie. Nous avons pu montrer que la zone de surpression avait un impact notable sur la valeur du paramètre de Compton intégré (65%) et sur celle de la masse de l’amas (79%). Ces deux paramètres sont essentiels pour l’utilisation cosmologique des grands catalogues d’amas. Ainsi, les résultats obtenus dans cet article soulignent l’importance du grand programme SZ de NIKA2 pour la caractérisation de la dispersion de la relation d'échelle SZ-masse et donc pour la cosmologie avec des amas.
Le grand programme d’observation SZ de NIKA2 bénéficie de 300 heures d’observation accordées par l’IRAM dans le cadre du temps garanti attribué à la collaboration NIKA2. L'objectif est d’étalonner en masse un échantillon représentatif constitué de 50 amas de galaxies sélectionnés en SZ (catalogues Planck et ACT) à un décalage vers le rouge moyen à élevé (0,5 <z <1) et couvrant un ordre de grandeur en masse. L’observation des amas de cet échantillon permettra de mener une étude complète de la morphologie et de l'évolution des amas. De plus, ces données seront combinées aux données X du satellite XMM-Newton afin d’étudier les profils thermodynamiques radiaux (densité, pression, masse, température, entropie). Ces derniers sont essentiels pour une compréhension complète de la relation observable-masse des amas de galaxies qui permettra in fine d'exploiter les grands relevés d’amas pour contraindre la cosmologie
Plus d’informations :
First Sunyaev-Zel'dovich mapping with NIKA2: implication of cluster substructures on the pressure profile and mass estimate, F. Ruppin, F. Mayet, G. W. Pratt et al., accepté dans Astron. and Astrophys., arXiv:1712.09587
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Le groupe NIKA2 du LPSC a bénéficié des compétences des services techniques et administratifs du laboratoire. Cette activité est financée notamment par l’ANR avec le projet NIKA2Sky (ANR-15-CE31-0017 et http://lpsc.in2p3.fr/NIKA2Sky), le projet ANR-12-BS05-0007 project (2013-2015) et le Labex Enigmass.
Le grand programme d’observations SZ de NIKA2 (http://lpsc.in2p3.fr/NIKA2LPSZ/) regroupe 10 instituts européens dont l’IN2P3, l’INSU et le CEA au niveau français.
Mesure de la composante secondaire du rayonnement cosmique par AMS
Les explosions d'étoiles comme les supernovae projettent dans l'espace interstellaire des noyaux à des vitesses relativistes appelés rayons cosmiques. Lorsque ces noyaux entrent en collision avec le gaz épars entre les étoiles, ils produisent une cascade de particules, appelées rayons cosmiques secondaires. Cette composante peut être utilisée pour tracer l'histoire des rayons cosmiques lors de leur propagation dans la galaxie. Les mesures des flux de lithium, béryllium et bore - trois espèces de rayons cosmiques secondaires - effectuées par le spectromètre magnétique alpha (AMS) à bord de la station spatiale internationale, permettent de caractériser avec une précision sans précédent cette composante. Un «durcissement» spectral des rayons cosmiques secondaires est notamment observé - un plus grand nombre de particules à des énergies élevées que ce que l'on pourrait attendre d'une loi de puissance standard. Un tel durcissement a déjà été observé par la collaboration AMS dans les rayons cosmiques primaires tels que l'hélium, le carbone et l'oxygène mais l'amplitude de ce durcissement est plus grande pour les rayons cosmiques secondaires que pour les rayons cosmiques primaires. Ces nouvelles observations suggèrent que de nouveaux mécanismes doivent être pris en compte pour décrire avec précision la propagation des rayons cosmiques à travers l'espace.
Actualités IN2P3 :
http://www.in2p3.fr/recherche/actualites/2018/breve_ams_rayonssecondaires.html
Pour en savoir plus :
https://physics.aps.org/synopsis-for/10.1103/PhysRevLett.120.021101
https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.120.021101
La caméra NIKA2 en phase d’exploitation scientifique
L’installation de la caméra millimétrique NIKA2 au télescope de 30 mètres à Pico Veleta (Espagne) a été finalisée en octobre 2017. Elle marque la fin de la première phase du projet (2011-2016) qui a porté sur la conception, la construction et l’installation de la caméra. La caméra a été acceptée en tant qu’instrument IRAM et ouverte à la communauté scientifique. L’avènement de la camera NIKA2 au télescope de 30 mètres constitue une opportunité unique pour les observations millimétriques, notamment pour la cosmologie avec des amas de galaxies, grâce à ses deux bandes de fréquence (150 et 260 GHz), sa grande sensibilité, son excellente résolution (11 et 18 arcsec) et son grand champ de vue (6.5 arcmin).
La phase d’exploitation scientifique de la caméra NIKA2 au télescope de 30 mètres a débuté en octobre 2017 et est prévue pour durer dix ans. La collaboration NIKA2 bénéficie de 1300 heures d’observations en temps garanti, partagé en cinq programmes d’observation correspondant à cinq objectifs scientifiques.
La caméra NIKA2 a été construite par une collaboration internationale, dirigée par des laboratoires grenoblois (Institut Neel, LPSC, IPAG et IRAM), qui a répondu avec succès en 2011 à un appel d'offres lancé par l'IRAM concernant la prochaine génération de caméra pour le télescope de 30 mètres.
En particulier, le LPSC a développé une électronique spécifique dédiée à l'instrument NIKA2. Celle-ci est composée de 20 cartes de lecture réparties dans 3 châssis différents (un par matrice). Sur chaque carte de lecture, la fabrication des peignes de fréquences (jusqu'à 300 fréquences simultanées) et leur analyse est réalisée en bande de base grâce à des FPGA et des convertisseurs analogique-numérique et numérique-analogique. Une grande quantité de processeurs de signaux numériques (DSP) (de l'ordre de 850) permettent de bénéficier de la puissance de calcul nécessaire aux manipulations fréquentielles et à la détection de la variation des fréquences de résonance.
Dans la première phase, le groupe a été fortement impliqué dans l’instrumentation, l’analyse de données (commissioning de la caméra) et dans le management de la collaboration internationale. Le groupe NIKA2 du LPSC a bénéficié des compétences des services techniques et administratifs du laboratoire.
Pour l’exploitation scientifique, le LPSC assure la responsabilité du programme d’observations SZ qui permettra l’observation de 50 amas de galaxies avec le télescope de 30 m de l’IRAM au cours des cinq prochaines années. Ce programme bénéficie de 300 heures d’observation accordées dans le cadre du temps garanti attribué au consortium NIKA2. L'objectif principal est d’étalonner en masse un échantillon représentatif constitué de 50 amas de galaxies sélectionnés en SZ (catalogues Planck et ACT), ce qui permettra d'exploiter les grands relevés pour contraindre la cosmologie.
Plus d’informations :
The NIKA2 large field-of-view millimeter continuum camera for the 30-m IRAM telescope
R. Adam et al., Astron. and Astrophys 609 (2018) A115, arXiv:1707.00908,
Contact : F. Mayet
Observatoire Pierre Auger
Les rayons cosmiques les plus énergétiques proviennent d’au-delà de notre galaxie
Voir le communiqué de presse du CNRS
Communiqué de la collaboration Pierre Auger :
Dans un article publié dans Science la Collaboration Pierre Auger présente les résultats de ses recherches montrant que les rayons cosmiques d’une énergie un million de fois supérieure à celle des protons accélérés dans le Grand Collisionneur de Hadron (LHC, au CERN) proviennent de bien au-delà de notre Galaxie.
Depuis que des rayons cosmiques avec des énergies de plusieurs Joules ont été observés dans les années 1960, la question de savoir si de telles particules sont produites au sein de la Voie lactée ou dans des objets extragalactiques éloignés fait débat. Ce mystère vieux de 50 ans a été résolu en étudiant des particules cosmiques d'énergie moyenne de 2 Joules détectées avec le plus grand observatoire de rayons cosmiques jamais construit, l'Observatoire Pierre Auger en Argentine. À ces énergies, on mesure un flux de rayons cosmiques en provenance d’un côté du ciel environ 6% plus élevé que du côté opposé, le maximum de flux pointant dans une direction située à 120 ° du centre Galactique.
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Vue d’artiste d’une gerbe atmosphérique © A. Chantelauze, S. Staffi, L. Bret |
NIKA observe la fusion d’amas de galaxies
Une équipe de chercheurs du consortium NIKA1, dirigée par Rémi Adam (Laboratoire Lagrange – OCA, UCA, LPSC Grenoble, CNES), Iacopo Bartalucci et Gabriel Pratt (CEA Saclay), a obtenu pour la première fois une image de la vitesse du gaz lors de la fusion de plusieurs amas de galaxies. Ces observations offrent une nouvelle manière d'étudier la formation des amas comme composants essentiels des grandes structures, formés lors des événements les plus énergétiques dans l’Univers. Avant d’obtenir ces observations, le consortium NIKA, dirigé par Alain Benoît et Alessandro Monfardini (Institut Néel), a également construit, testé et mis en service l’instrument.
Image multi-longueur d’onde du groupe d'amas MACS J0717.5+3745 montrant la distribution des galaxies (en vert, données du télescope spatial Hubble), la densité du gaz (en rouge, rayonnement X, données Chandra), la pression électronique du gaz (en bleu, caméra NIKA) et le signal kSZ (contours jaunes, NIKA). Les cercles rouges (A, B, C et D) indiquent la position des principaux sous-amas. A la distance de l'amas (environ 5 milliards d'années-lumière), la taille de l'image correspond à environ 5 millions d'années-lumière. ©Consortium NIKA
Les amas de galaxies : pièces fondamentales de notre Univers
L'Univers dans lequel nous vivons aujourd'hui a été façonné par la formation des grandes structures, qui ont commencé à se former par effondrement gravitationnel il y a environ 14 milliards d'années, juste après le Big Bang. Aujourd'hui, les plus grands objets gravitationnellement liés, qui constituent les pièces fondamentales de notre Univers, sont les amas de galaxies. Malgré leur nom, les amas de galaxies sont principalement composés de matière noire (~ 85%) et de gaz chaud ionisé (~ 12%), avec seulement quelques pourcents de leur masse contenue dans les galaxies. Pour cette raison, le processus de formation des amas est dominé par l'effondrement gravitationnel de la matière noire, le gaz et les galaxies "suivant" ce processus. Au cours de leur assemblage, les amas peuvent entrer en collision les uns avec les autres, avec une vitesse élevée. Ces fusions sont les événements les plus énergiques depuis le Big Bang et ils sont fondamentaux pour comprendre comment s’assemblent les structures dans l'Univers.
NIKA : un défi scientifique
Une façon d'étudier la vitesse des amas est de mesurer l'empreinte de leur mouvement dans le rayonnement du fond diffus cosmologique (CMB) par l'utilisation de l'effet Sunyaev-Zel'dovich cinétique (kSZ). Cet effet provient du décalage Doppler des photons du CMB quand ils interagissent avec les électrons du gaz intra-amas qui se déplacent à grande vitesse. L'effet kSZ est le seul moyen connu de mesurer directement la vitesse particulière d'objets à des distances cosmologiques, parce que contrairement à d'autres méthodes, le rayonnement du CMB lui-même fournit une référence absolue pour la mesure. Si son homologue thermique (l’effet Sunyaev-Zel'dovich thermique, tSZ) est maintenant couramment utilisé pour mesurer la pression du gaz dans les amas, l'effet kSZ reste quant à lui très difficile à observer et seulement une poignée de détections de faible signification statistique a été obtenue jusqu'à présent.
The New IRAM KIDs Array, (NIKA) était le prototype de la caméra de plus grandes dimensions, NIKA2, récemment installée au télescope de 30m de l’IRAM. NIKA et NIKA2 observent les signaux astronomiques à 150 et 260 GHz, et en principe, cette approche double-bande permet aux astronomes d'extraire à la fois le signal tSZ et kSZ quand ils observent les amas de galaxies. Motivée par le défi scientifique et les performances élevées de NIKA, l'équipe a décidé de tenter une mesure de l’effet kSZ en cartographiant l’un des amas où le processus de fusion est des plus violents, MACS J0717.5+ 3745, et dont le décalage vers le rouge de 0.55 correspond à une distance de plusieurs milliards d’années lumières.
Gauche : signal kSZ en direction de l’amas MACS J0717.5+3745 (rapport signal sur bruit), donnant la quantité de mouvement du gaz sur la ligne de visée. Droite : vitesse du gaz sur la ligne de visée, en km/s, par rapport au référentiel du CMB. ©Consortium NIKA
Cette cartographie kSZ fournit la quantité de mouvement du gaz intégrée sur la ligne de visée par rapport au cadre de référence du CMB; c’est donc une mine d'informations pour comprendre la physique des amas en fusion. Les données ont révélé que les deux sous-amas principaux de MACS J0717.5+3745, à savoir B et C (Figure 1), sont en train de tomber l’un sur l'autre avec une très grande quantité de mouvement (Figure 2, à gauche). Rémi Adam souligne : « la simple détection de l'effet kSZ est déjà un excellent résultat en soi, mais quand nous avons réalisé que nous étions en mesure d'en obtenir une carte, ce fut un succès considérable pour nous ».
La mesure du signal kSZ est une première étape, mais il est encore plus difficile de mesurer la vitesse du gaz elle-même, car il est nécessaire pour cela de séparer le signal kSZ de la distribution de densité du gaz le long de la ligne de visée. Cette procédure a requis l'utilisation d'observations en rayons X par les satellites XMM-Newton et Chandra, qui, grâce à un modèle physique, ont permis à l'équipe de mesurer la vitesse de déplacement de l’amas et même d'extraire une carte de la vitesse du gaz par rapport au référentiel du CMB (figure 2, à droite). L'image obtenue n’est pas facile à interpréter car elle dépend des hypothèses de modélisation. Elle est néanmoins particulièrement frappante car elle présente, pour la première fois, une image du gaz en mouvement dans un amas de galaxies, qui de plus est très lointain.
Ces résultats ouvrent la voie à une nouvelle manière d'étudier la fusion des amas, en montrant que de telles observations sont maintenant possibles avec une résolution angulaire élevée et des instruments de haute sensibilité, telle que la caméra NIKA au télescope de 30m de l’IRAM. Le nouvel instrument NIKA2, maintenant installé au télescope, offre des perspectives très prometteuses pour l'étude des amas de galaxies, y compris les amas en fusion par l'effet kSZ. Cela permettra aux astronomes d'étudier la formation des grandes structures dans l'Univers lointain.
Contact scientifique : Rémi Adam, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
1-Le consortium NIKA inclut des scientifiques, ingénieurs et techniciens de l’Institut Néel, l’IPAG, le LPSC, l’IRAM, l’IAS, le CEA, l’IRAP, l’IEF, l’IAP, l’Observatoire de Paris, Sapienza Università di Roma, le LAM, l’UCL, l’Université de Cardiff, l’ESO, le laboratoire Lagrange (OCA) et l’IAC. Les résultats présentés ici impliquent des scientifiques du JPL, du RIT, Arizona State University, the University of Arizona et Università degli Studi di Roma Tor Vergata.
Mapping the kinetic Sunyaev-Zel’dovich effect toward MACS J0717.5+3745 with NIKA, R. Adam, I. Bartalucci, G.W. Pratt et al. (2017) , A&A (en cours de publication), arXiv.org pour une version électronique.
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